Accueil > Développement personnel > Comment manager sans s’épuiser ?

Comment manager sans s’épuiser ?

Publié le 7 février 2023
Partagez cette page :

C’est un paradoxe : le manager est indispensable au fonctionnement de l’entreprise…  Mais nombreux sont ceux d’entre eux qui ne veulent plus exercer ce métier, et encore moins en période post-covid. Et pour cause, les crises successives ont mis à mal la santé des managers. Comment expliquer une telle situation ? Quels sont les enjeux liés à l’épuisement professionnel des managers ? Quelles solutions pratiques mettre en œuvre ? Les explications avec Michael Nlandu, manager et responsable d’un centre de formation.

Épuisement professionnel des managers

44 %, c’est le nombre de managers qui se déclarent en situation de détresse psychologique, selon le dernier baromètre du cabinet Empreinte Humaine, spécialisé dans la prévention des risques psychosociaux. « Un chiffre alarmant » qui s’explique pour différentes raisons. « On s’est rendu compte que le métier de manager, responsable de la performance et du bien-être de son équipe, est de plus en plus exigeant, notamment dans un mode de travail hybride ou à distance. » Un mode de management qui nécessite, en effet, davantage d’investissement et d’intentionnalité de la part du manager, dans un contexte complexe et instable. Manager ses équipes à distance peut s’avérer plus difficile pour :

  • maintenir la motivation et l’engagement
  • maintenir le lien, la cohésion d’équipe
  • évaluer les besoins et les attentes de chaque membre de l’équipe
  • résoudre les conflits

Résultat : les managers n’en peuvent plus et sont épuisés professionnellement. 

« Le manager en bonne santé est une espèce en voie de disparition. »

Lire aussi : Management à distance et en mode hybride : comment être efficace ?

Et, les chiffres parlent d’eux-mêmes. Selon un sondage OpinionWay pour la Maison du management, 62 % des salariés français ne veulent pas devenir managers. En cause : le manque de gratification et de valorisation.

« Le métier de manager ne fait plus rêver. »

De même, selon un sondage OpinionWay pour Indeed, 51 % des managers trouvent que le métier est devenu trop difficile post-covid.

Épuisement professionnel des managers : le cumul de facteurs

Selon les résultats des études de Yerkes et Dodson (1908), le stress a un impact direct sur le niveau de performance d’un individu. Fatigue, épuisement, rupture, voire burn-out… un niveau de stress prolongé et trop élevé entraîne, en effet, des perturbations émotionnelles, cognitives, comportementales et somatiques. En cause : le décalage entre la perception des exigences auxquelles l’individu est soumis et la perception de sa capacité à y faire face.

Loi de Yerkes Dodson
Impact du stress : courbe de Yerkes et Dodson (1908).

Les facteurs externes

On dénombre huit facteurs externes qui entraînent l’épuisement professionnel. Et, bien souvent, ces facteurs se cumulent.

Il s’agit de : la surcharge de travail ; la complexité et l’intensité du travail ; le déséquilibre entre vie professionnelle et vie personnelle ; les exigences émotionnelles (gérer le décalage entre les émotions et le ressenti) ; le manque d’autonomie et de marge de manœuvre ; les mauvais rapports sociaux ; les conflits de valeurs (désaccords) et l’insécurité de l’emploi.

Les facteurs internes

Il existe aussi des facteurs internes. L’épuisement professionnel peut toucher tout le monde. Aucune corrélation n’existe entre l’âge, le sexe, la CSP… Mais, il existe des cibles plus enclines. Il s’agit notamment des personnes fortement investies et très attachées à la valeur travail. Parmi les cibles, on compte également les personnes qui craignent d’être ou de paraître incompétentes (syndrome de l’imposteur) et les personnes ultra-perfectionnistes.

Savoir détecter les signaux d’alerte

Les signaux d’alerte, de quatre natures différentes, se traduisent par un changement notoire. D’abord, physique. Cela se traduit par de la fatigue, des douleurs. C’est la traduction somatique du stress. Cognitif ensuite, c’est-à-dire la difficulté à se concentrer par exemple. Émotionnel aussi : colère, tristesse. Comportemental enfin, particulièrement l’isolement. Les actions à mener consistent donc en partie à prévenir ces manifestations de mal-être.

Afin de prévenir ces manifestations, le Dr Dominique Servant du CHU de Lille a élaboré un test en 2010. Ce test permet en effet de quantifier le niveau de stress, aussi bien pour soi-même que pour son équipe. À l’appui, une série de vingt questions pour évaluer le niveau de stress sur une échelle de 0 à 3, pour un score final situé entre 0 et 60. L’intérêt : pouvoir détecter à la fois les signaux d’alerte et les facteurs déclencheurs. D’où la mise en œuvre d’actions concrètes au niveau individuel et collectif.

Combattre le stress : les solutions individuelles

Je suis confronté à une situation de stress aigu, comment réagir ?

«  Il existe des solutions ponctuelles à mettre en place pour dépasser ou prévenir une situation de stress aigu. »

D’abord, la première solution pratique consiste à réaliser des exercices de respiration abdominale. En gonflant l’abdomen et en stimulant le diaphragme, vous réduisez physiquement et mécaniquement la « boule au ventre » et vous réduisez neurologiquement la sécrétion des hormones du stress. « On peut s’entraîner. Cet exercice quotidien permet ensuite de puiser cette ressource. »

La deuxième solution serait de « rester connecté au présent » pour ne plus ruminer ni ressasser, soit via la méditation qui permet d’ancrer son attention, ou via une activité physique.

Quant à la troisième solution, elle réside dans le lâcher-prise. « J’agis plus que je ne subis. » L’objectif : essayer d’agir et d’élargir sa zone d’influence, tout en acceptant les limitations.

Lire aussi : Gestion du stress : quels outils face aux nouveaux enjeux ?

L’organisation en question : les solutions durables 

Prévenir et envisager des solutions pour combattre l’épuisement professionnel des managers consiste à mener une réflexion sur l’organisation dans sa globalité. Et, ce, à trois niveaux.

Au niveau du manager

Respect des horaires, limitation des notifications digitales, priorisation des tâches à différentes échelles temporelles, définition d’objectifs… Le manager doit se fixer des limites réalistes. Autrement dit, s’imposer un cadre et s’obliger à le respecter.

De même, il s’agit de « se donner de l’énergie », c’est-à-dire, prendre du temps pour soi. Cela consiste à installer intentionnellement des plages de « rendez-vous avec soi » dans son quotidien (loisirs, sport…).

Accepter de ne pas être tout-puissant quand bien même le système manager-collaborateur-dirigeant enferme le manager dans ce rôle.

« Les organisations résilientes sont celles où justement, on n’enferme pas le manager dans ce rôle. »

Le manager doit formuler ses besoins en matière de temps (« Ce mois-ci je… »), de moyens et de relations.

Au niveau des managers de managers

De quoi avez-vous besoin pour être autonome ? Cette question relève de la responsabilité des dirigeants qui doivent donner de l’autonomie et des moyens à leurs managers de proximité.

Cela passe également par les actions suivantes : écouter et réduire les irritants, entretenir une ambiance positive, définir des cadres plus précis et plus clairs et des objectifs réalistes, décider et prioriser.

« De façon globale, il s’agit de repenser l’organisation du travail pour la simplifier. »

Au niveau de l’entreprise

Plusieurs solutions peuvent être envisagées au niveau de l’entreprise : mettre en place des réseaux de confiance, former aux premiers secours en santé mentale, réduire les temps de réunion, être plus attentif à la charge/ressource, encourager la pratique d’une activité physique corporate.

« Idéalement, il faudrait cumuler ces trois niveaux d’actions. »

Ce qu’il faut retenir : des solutions existent pour faire face à l’épuisement professionnel des managers et prévenir les nombreuses manifestations de mal-être. Au niveau individuel, il existe des solutions ponctuelles à mettre en place pour dépasser ou prévenir une situation de stress aigu. Il s’agit aussi de mener une réflexion sur l’organisation dans sa globalité, et, ce, à trois niveaux (manager, managers de managers, entreprise). Mais, il faut avant tout commencer par soi (premier niveau) : se fixer des limites acceptables pour soi et être résolu à les maintenir. Ces solutions pratiques de la part du manager lui-même sont possibles à mettre en œuvre, et ce, progressivement.

Notre expert

Michael NLANDU

Coaching

Ingénieur excellence opérationnelle de formation, formateur et coach de vocation, il accompagne depuis 20 ans […]

domaine de formation

formations associées