Dans un monde hyperconnecté et plein de sollicitations, les managers sont confrontés à un défi majeur : maintenir une concentration optimale pour atteindre leurs objectifs. Coach et formatrice en gestion du temps et organisation personnelle, Marine Gandouet explore les différentes stratégies et outils qui permettent aux managers de préserver leur concentration. Voire, de l’amplifier.
À l’ère du digital, est-on encore vraiment capable de maintenir sa concentration sur l’essentiel ? Comment être un manager proactif auprès de son équipe sans tomber dans le piège des multiples sollicitations ? Comment rester concentré sans s’épuiser ?
Mais, d’abord, qu’est-ce que la concentration ?
On pourrait définir la concentration comme la capacité à ne faire qu’une seule chose à la fois et à la mener à son terme.
Savez-vous qu’il faut 23 minutes et 15 secondes pour se concentrer à nouveau quand l’on a été interrompu dans une action ? C’est le résultat d’une étude menée par l’Université d’Irvine en Californie.
En sciences cognitives, la concentration fonctionne quand 3 critères sont réunis :
- L’attention sélective : choisir une cible
- La capacité d’inhibition : écarter les distractions
- L’attention soutenue : maintenir dans la durée
Les sources principales qui altèrent la concentration sont : le bruit, la fatigue, le stress, l’environnement de travail, les interruptions, les problèmes personnels et le manque d’interactions sociales. Éventuellement en lien avec une hyperconnectivité.
Les sollicitations et leurs conséquences sur la concentration
En moyenne, chaque personne consulte son téléphone 80 à 150 fois par jour, selon les dernières études. Des chiffres larges, mais qui montrent bien à quel point les smartphones perturbent la concentration. Si l’on ajoute les sollicitations des collaborateurs, les notifications d’e-mails sur l’ordinateur et toutes autres sollicitations externes, rester concentré relève du défi !
Pour la sophrologue Cécile Vilatte, il existe trois manières de gérer les sollicitations.
- Y apporter une réponse immédiate, en arrêtant l’activité en cours, avec une incidence forte sur la concentration.
- Négocier un report de la demande, ce qui occasionne une incidence moyenne, car négocier prend du temps.
- Programmer, c’est-à-dire s’organiser pour ne pas être interrompu. Dans ce cas, il n’y a pas d’incidence car pas d’interruption.
Les conséquences de ces interruptions à répétition sont nombreuses.
Des conséquences individuelles…
C’est d’abord du temps perdu au détriment de toutes les autres tâches inscrites dans votre agenda ou to-do list. Votre cerveau n’a plus la capacité de tout gérer en même temps et de garder un cap. Les interruptions à répétition peuvent donc entraîner une surcharge mentale.
De plus, devoir s’arrêter le soir peut être vécu comme difficile, alors qu’il reste tant à faire. Cela ajoute un sentiment de frustration en fin de journée. Voire de l’angoisse, sachant que le lendemain il faut débuter la journée avec la liste non terminée de la veille et que d’autres activités vont venir s’y ajouter.
Lorsque la sensation d’avoir « la tête sous l’eau » est présente, il est possible de perdre du sens dans ce que l’on fait. La démotivation peut alors faire son apparition.
… à l’impact collectif
Quand on est manager, s’ajoutent à cela des conséquences collectives. Par exemple : oublier de garder un cap pour son équipe, avec des objectifs clairs et partagés, ou négliger les feedback.
Tout cela mis bout à bout favorise le burn-out. C’est un cercle vicieux qu’il faut repérer au plus vite pour inverser la tendance et impulser un cercle vertueux.
Dire ciao aux interruptions en 6 étapes
J’ai pu identifier 6 étapes qui permettent de se débarrasser des interruptions. Ce qui est important, c’est d’abord de comprendre le pourquoi d’un comportement. Puis, c’est de déterminer comment répondre différemment à un besoin profond. Par exemple, celui de rester connecté.
1/ Lister les sources de distraction
Prenons l’exemple des notifications LinkedIn.
2/ Quantifier le nombre de distractions par jour
J’en reçois en moyenne 30 par jour. C’est autant de fois où je regarde mon téléphone et où je m’éloigne de mon action en cours.
3/ Identifier les bénéfices d’avoir moins de distractions
Je me sentirais plus efficace.
4/ Comprendre les besoins associés aux distractions
Je me rends compte que le fait d’aller sur LinkedIn me permet de rester au courant de l’actualité et de me sentir réactif.
5/ Chercher de nouvelles pistes qui répondent aux besoins
Je pourrais prévoir un temps de 15 minutes à 12 h 15 puis de nouveau 15 minutes à 16 heures pour aller sur LinkedIn. Cela me permettrait de répondre à mes besoins, sur des temps choisis et délimités.
6/ Mettre en place son nouveau bouclier
Je me sens alors aligné avec le fait d’enlever les notifications, car j’ai choisi les moments qui me conviennent le mieux pour profiter de ce réseau social.
Comment cultiver sa concentration ?
Au-delà de la question des sollicitations et autres interruptions, la concentration est aussi une compétence qu’on peut perfectionner.
Une organisation au service de votre concentration
Vous pouvez vous questionner sur vos habitudes de fonctionnement à partir des phrases ci-dessous.
Si vous avez répondu non à un ou plusieurs items, il s’agit sans doute d’autant de pistes d’amélioration.
Un plan d’action pour favoriser votre concentration
Voici quelques astuces et outils concrets pour passer rapidement à l’action.
1/ Limiter les interruptions
- Définissez des créneaux dédiés pour consulter vos e-mails et vos réseaux sociaux.
- Privilégiez une démarche proactive. Identifiez les collaborateurs qui vous sollicitent au quotidien plusieurs fois par jour et définissez pour eux des temps dédiés. Demandez à vos équipes d’écrire leurs questions et remarques pour vous les transmettre au moment opportun. Lors d’un point hebdomadaire, par exemple.
- Videz-vous la tête à l’aide d’une checklist dédiée et/ou d’un logiciel de prise de notes.
- Mettez en place une prise de recul digitale : enlevez la majeure partie de vos notifications sur mobile ainsi que les notifications d’e-mails sur ordinateur.
- Communiquer à vos équipes ce changement d’organisation, pour donner du sens et leur montrer les bénéfices pour vous et, par ricochet, pour eux.
2/ Des outils dédiés
| Forest | Application de gestion du temps qui permet de planifier des sessions de travail de 25 minutes pendant lesquelles l’utilisateur doit rester concentré sur sa tâche. Pendant cette période, l’application bloque les notifications et encourage l’utilisateur à rester concentré. S’il y parvient, un arbre virtuel est planté dans l’application. |
| Freedom | Application qui permet de bloquer l’accès à certains sites web ou applications pendant une période déterminée. L’utilisateur peut alors se concentrer sur sa tâche sans être distrait par les notifications ou les réseaux sociaux. |
| Focus@Will | Application conçue pour stimuler la concentration et bloquer les distractions grâce à une sélection de musiques. |
| Offtime | Application qui permet de planifier des périodes de temps hors ligne pendant lesquelles l’utilisateur peut bloquer les appels, les messages et les notifications. Il est possible de définir des exceptions pour certains contacts ou applications. |
| RescueTime | Application de gestion du temps qui permet de suivre le temps passé sur différents sites web et applications. Elle fournit aussi des rapports détaillés sur l’utilisation du temps. L’utilisateur peut définir des objectifs de temps pour éviter les distractions et maximiser sa productivité. |
3/ Un environnement de bureau rangé et agréable
Trois facteurs clés sont à prendre en considération dans un aménagement de bureau favorable à la concentration et à l’efficacité :
- L’éclairage naturel
- La température idéale
- La limitation des bruits et des mouvements
Si vous n’avez pas la main pour agir sur ces trois facteurs clés (en open space, notamment), vous pouvez sûrement :
- Avoir une surface de bureau dégagée
- Débarrasser votre bureau de tout ce qui n’est pas lié à ce que vous faites
- Avoir à portée de main tous les outils nécessaires au quotidien
- Disposer de plusieurs tiroirs, bannettes à courrier ou porte-revues (fournitures, dossier « À faire », classement…)
Ainsi, à moins de travailler en flex office, il vous est possible d’investir et de personnaliser votre espace de travail de manière à ce qu’il soit inspirant et motivant.
Quand une personne a le contrôle sur l’aménagement de son environnement de travail et qu’elle peut le décorer à son goût, sa productivité et son niveau de satisfaction au travail peuvent augmenter de façon considérable, jusqu’à 32 %.
Étude de l’école de psychologie de l’Université d’Exeter en Angleterre.
La concentration est rudement mise à l’épreuve dans l’environnement professionnel. Prendre conscience des différentes interruptions quotidiennes est déjà un premier grand pas. Bonne nouvelle : pour la plupart d’entre elles, vous avez la main pour les diminuer et les exclure totalement. Reste à cultiver votre concentration au quotidien. De nombreuses pistes existent : à vous d’explorer et de trouver ce qui vous correspond le mieux !
