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Codéveloppement : un levier de transformation au service de l’entreprise !

Publié le 16 mars 2023
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Technique de formation-action, le codéveloppement est un allié précieux dans un contexte de transformation. Confrontées à une complexité croissante, les entreprises voient en effet leurs modèles bousculés. Ce qui impacte aussi bien le développement professionnel que le leadership des managers. Savoir prendre du recul et adopter une posture d’amélioration continue dans sa pratique professionnelle devient essentiel ! C’est justement un des apports du codéveloppement. Le point avec Fabiola Ortiz, coach et facilitatrice de groupes de codéveloppement.

Séance de travail entre collaborateurs

Le codéveloppement, qu’on appelle parfois « codev », est d’une grande actualité dans un monde VUCA (Volatile, Uncertain, Complex, Ambiguous) où les modèles de management sont bousculés. En effet, le leader n’est plus un sachant indiquant la voie mais plutôt un facilitateur permettant l’éclosion du potentiel de chacun. Le développement de l’identité professionnelle et l’expression de son plein potentiel sont donc au centre des défis de la fonction managériale.

Complémentaire des approches traditionnelles de formation continue, le codéveloppement constitue une réponse adaptée pour les managers et les entreprises qui sont en recherche de performance dans un contexte de transformation. Pourquoi ? Parce qu’il aborde un aspect critique qui est la capacité des individus à faire évoluer leur posture et à être acteurs du changement. Comment ? En s’appuyant sur une approche expérientielle qui exige une démarche active des parties prenantes.

En quoi consiste le codéveloppement ?

Le codéveloppement se base sur le cycle : Action, Réflexion, Intelligence collective, Action. Le point de départ des apprentissages est donc bien la pratique professionnelle des participants. Il n’y a pas de contenu théorique préétabli. De plus, le codéveloppement prône la prise de recul et l’amélioration continue des pratiques professionnelles. Questionnant le savoir-faire et le savoir-être, il invite à développer une vision holistique de l’identité professionnelle.

Les principes fondamentaux du codéveloppement

Le codéveloppement s'appuie sur quatre principes fondamentaux.

Le codéveloppement : aspects pratiques

Le codéveloppement consiste en un groupe de pairs qui se réunit régulièrement dans une démarche apprenante avec un facilitateur garant de la méthode et de la posture du groupe.

Le groupe se compose de huit personnes au plus. Il peut être constitué en inter ou intra-entreprise. Il définit lui-même ses modalités de réunion. Généralement, il se réunit à raison d’une séance par mois qui dure deux à trois heures.

En principe, il y a autant de séances que de membres dans le groupe. Une séance se compose de six phases, dont les durées sont déterminées par le groupe.

Une séance de codéveloppement se déroule en six étapes.

Les objectifs d’une séance de codéveloppement

Lors de chaque séance, un des participants devient le « Client ». Il est alors au centre de la démarche. Il soumet au groupe un sujet de son actualité professionnelle sur lequel il veut s’aider de l’intelligence collective afin d’élargir sa réflexion avant de passer à l’action.

Les autres membres du groupe jouent alors le rôle des « Consultants ». Leur mission ? Aider le Client à approfondir sa réflexion à l’aide de leurs questionnements et de leurs apports.

Autant les questions posées que les pistes évoquées aident le Client à développer un regard nouveau qui va lui permettre de passer à l’action. La méthodologie est basée sur la prise de recul, la bienveillance et l’autonomie du Client.

Quels sont les sujets abordés par le codéveloppement ?

Le codéveloppement permet aux membres du groupe d’aborder leurs défis actuels : un projet, une préoccupation ou une problématique.

Quelques exemples :

  • Un membre de mon équipe est en forte résistance sur l’évolution de l’entreprise. Je m’inquiète de sa capacité à démobiliser le collectif. Quels sont mes leviers de management ?
  • En tant que responsable de projet, j’ai un positionnement inconfortable sur un sujet x qui est hautement politique et incontournable pour la réussite du projet. Quels sont mes leviers d’influence ?
  • Malgré mes années d’expérience et mon expertise confirmée, je manque de confiance. J’ai souvent des sentiments d’imposture. Cela affecte mon positionnement professionnel et ma capacité à contribuer sur des projets. Quelles pistes voyez-vous pour surmonter le syndrome de l’imposteur ?

Une démarche d’amélioration continue

Aborder les sujets en groupe, dans un cadre confidentiel et sécurisé, permet aux membres de dépasser leurs limites et d’adopter une démarche d’amélioration continue précieuse dans le cadre de la transformation.

Pourquoi se réunir dans la durée ?

D’une part, parce que la création de la confiance est fondamentale pour l’efficacité et l’impact du groupe. Suivant la métaphore de Claude Champagne et Adrien Payette, créateurs de la méthode : tel un groupe de jazz lors d’une jam session, le groupe de codéveloppement se cherche et, progressivement, gagne en profondeur. Autrement dit, il devient capable de cerner avec plus de pertinence les problématiques et de développer de l’innovation dans les solutions proposées.

D’autre part, parce que la durée permet à chaque participant de soumettre une problématique à la réflexion du groupe. Ainsi, chacun vient pour apprendre sur un pied d’égalité et dans une démarche d’intelligence collective.

Le codéveloppement étape par étape : cas pratique

Dans ce cas pratique, je suis la facilitatrice d’un groupe constitué dans une entreprise industrielle traversant une restructuration. La thématique ? Accompagner les managers dans la conduite du changement afin de pérenniser la transformation.

Nous choisissons ensemble la personne qui sera le « Client » lors de la prochaine séance programmée dans un mois. Cela lui donne le temps de réfléchir à son sujet et de préparer sa présentation : c’est une première étape de prise de recul et d’objectivation de la problématique.

Un mois après, le groupe est donc prêt à travailler autour du sujet proposé.

1re phase : présenter la problématique – 10 minutes

La Cliente présente sa problématique aux Consultants. Elle est confrontée à la fusion de deux départements d’audit. Elle sent une rivalité historique entre les deux équipes qui ont des approches différentes du métier. Future responsable de l’équipe, elle souhaite mener à bien la fusion. Elle aborde donc aussi bien les aspects objectifs, liés aux faits, que subjectifs, liés à son ressenti.

Ses questionnements

  • Comment mener à bien cette fusion ?
  • Comment incarner un positionnement managérial basé sur l’équité entre les deux équipes ?
  • Comment apaiser les tensions existantes ?
  • Comment créer de la cohésion et de la collaboration pour constituer une seule équipe ?

Les Consultants prennent des notes. Ils essaient de développer leur posture d’écoute et de curiosité.

2e phase : clarifier la problématique – 40 minutes

C’est le temps de l’exploration. Les Consultants ont besoin de comprendre la complexité de la situation et la problématique du Client dans la situation (dimension objective et subjective). Ils posent donc des questions de clarification, à travers des questions ouvertes, pour identifier les vrais enjeux et les points de blocage. En même temps, ils affinent leurs propres compétences : écoute active, curiosité, non-jugement, résistance cognitive face aux solutions précipitées.

Par exemple :

  • Quels sont les risques que tu anticipes ?
  • Quels sont les leviers dont tu disposes avant et après la fusion ?
  • Quelle est la vision des deux équipes ?
  • Quel est ton positionnement actuel face à ces deux équipes ?

Ces questions de clarification invitent la Cliente à élargir sa réflexion en envisageant des angles qu’elle n’avait pas pris en considération auparavant.

3e phase : formaliser le contrat de consultation – 10 minutes

À ce stade, le groupe a une compréhension plus claire de la problématique. La Cliente a poursuivi sa prise de recul. Il est temps de formaliser un contrat de consultation qui fixe le périmètre des apports des Consultants. La Cliente formule donc une demande claire et structurante sur ce qu’elle attend d’eux dans la phase suivante.

De toutes les phases du codéveloppement, celle-ci est la seule où le consensus est recherché : la question est-elle pertinente au vu de la problématique ? Adresse-t-elle le vrai point de blocage de la Cliente ? Chacun des Consultants peut-il contribuer au regard de la question posée ?

Initialement, la Cliente avait demandé : « comment puis-je motiver les équipes à travailler ensemble ? » Cette formulation, trop restrictive, limiterait les apports du groupe de codéveloppement aux solutions qui touchent à la motivation des équipes.

Le consensus est atteint sur une formulation plus large qui permet d’explorer différentes approches. « Quels leviers voyez-vous, avant et après la fusion des équipes, pour créer une culture commune en ligne avec la transformation et le développement de la cohésion de l’équipe ? » C’est donc cette question qui va délimiter le périmètre d’intervention des Consultants lors de la 4e phase.

4e phase : consultation – 30 minutes

À tour de rôle, les Consultants apportent un regard, des idées, des partages d’expérience en lien avec la question posée. Pour cela, ils s’appuient sur leurs différents savoirs et expériences. « Divergence » : c’est le mot-clé de cette étape du codéveloppement. En effet, leur objectif n’est pas la résolution du problème, ni l’identification de la solution idéale. Ils doivent permettre à la Cliente de poursuivre sa réflexion.

C’est pourquoi la Cliente ne participe pas activement lors de cette phase. Elle est invitée à adopter une posture d’accueil, de réflexion et d’écoute. Elle prend du recul sur ses propres modèles et peut alors identifier de nouvelles options ou prendre conscience des leviers disponibles pour la construction de son équipe.

5e phase : plan d’action – 10 minutes

La Cliente communique au groupe ses apprentissages et les actions qu’elle pense mettre en place.

  1. Établir une carte des alliés. Se rapprocher ses leaders informels des équipes pour comprendre leur point de vue et en faire des alliés au moment de l’intégration des équipes.
  2. Organiser un événement de lancement de l’équipe où les écueils et différentes approches pourraient être évoqués.
  3. Identifier une structure de travail basée sur des binômes et apte à favoriser la construction d’une nouvelle vision commune.

Cette phase est informative. Autrement dit, les intentions communiquées ne font pas l’objet d’un échange avec le groupe. Cette phase permet à la Cliente de formaliser son engagement vers l’action. Cela lui permettra ensuite de passer à l’action de façon intentionnelle et éclairée.

6e phase : faire le point sur les apprentissages de chacun – 20 minutes

La dernière étape est consacrée à l’autorégulation du groupe. Les échanges portent alors sur les apprentissages de chaque participant. Les apprentissages découlent autant du processus de codéveloppement en lui-même que des idées apportées sur le « cas » de la Cliente.

Les apprentissages au cours d’une séance de codéveloppement

Le codev permet des apprentissages liés au processus lui-même et à la problématique du client de la séance.

[À noter] Lors du démarrage de la séance suivante, la participante nous a communiqué que ses premières actions avaient été encourageantes. En approchant des membres de chacune des équipes, elle a pu identifier les points communs sur lesquels elle pouvait capitaliser : liens informels entre les membres des deux équipes, culture organisationnelle, construction d’une vision commune. La séance de codéveloppement lui a donc permis de se poser les bonnes questions et d’établir une stratégie d’action.

Avantages directs et indirects du codéveloppement

Dans un contexte de transformation, le codéveloppement présente des avantages directs. Il permet notamment la création de groupes apprenants orientés vers la mise en œuvre du changement. À la clé : adhésion accrue des acteurs, identification plus aisée des marges de manœuvre ou encore développement du sentiment d’appartenance pour pérenniser la transformation.

Il apporte aussi des avantages indirects liés aux savoir-être, tels que le développement d’une culture du parler-vrai, la résilience des communautés de travail ainsi que la prise de recul nécessaire à la résolution des problèmes de façon innovante.

Dans un contexte de transformation, le codev présente des avantages directs et indirects.

Pour conclure, le codéveloppement permet aux participants de se repositionner en acteurs du changement. Les groupes de pairs peuvent être créés autour des questions les plus épineuses de la transformation : ancrer le changement culturel, apprendre à gérer les résistances, adapter son style managérial… Le codéveloppement est donc un levier précieux dans un contexte de transformation !

Notre expert

Fabiola ORTIZ

Codéveloppement

Après un parcours international de 18 ans en entreprise, dont 12 en tant que directrice financière, elle est coach praticienne narrative. [...]

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