Encore sous-exploitée, la mobilité interne est pourtant un axe stratégique pour de nombreuses entreprises qui peinent à recruter, à fidéliser leurs talents ou encore à lutter contre l’obsolescence des compétences. Elle l’est également pour toutes les PME qui se développent et qui souhaitent que leurs collaborateurs se projettent avec elles. Mais, comment faut-il procéder concrètement ? Les éléments de réponse de Bérangère Fauquet, coach et formatrice.

Selon une étude Hays de 2021, 60 % des salariés interrogés préféreraient une mobilité interne à un mouvement externe et 94 % resteraient plus longtemps si leur entreprise investissait plus dans leur carrière.
Mobilité interne : quelle définition ?
Surtout connue sous le terme de promotion (mobilité verticale), la mobilité interne peut également prendre la forme d’une mobilité horizontale. C’est-à-dire, un changement de poste ou de métier tout en conservant le même niveau hiérarchique. L’évolution professionnelle ne consiste donc plus seulement à accéder à la fonction managériale ou à un statut supérieur. Aujourd’hui, les entreprises veillent aussi à l’enrichissement de l’expérience du collaborateur et le développement de sa polyvalence.
Mobilité interne : identifier les freins
Différents freins peuvent empêcher la mise en place optimale d’un processus de mobilité interne :
- la culture d’entreprise
- une politique non définie
- des outils insuffisants
- la taille de l’entreprise
Identifier les freins qui sont propres à votre entreprise est la première étape indispensable. Vous pourrez ensuite lever ces freins pour commencer à créer un nouveau réflexe : celui de l’interne.
Votre challenge : aider l’entreprise et ses collaborateurs à dépasser l’idée communément admise que changer d’entreprise est le seul moyen pour gagner plus ou accéder à de nouvelles missions.
Témoignage
Caroline, responsable communication et marketing dans le secteur de la recherche et du développement de produits
Mon poste de responsable communication a été repensé pour évoluer vers un poste de responsable communication et marketing. Cette évolution avait plusieurs objectifs. D’une part, enrichir mon poste pour me permettre d’évoluer en interne, et donc me fidéliser. D’autre part, faire face à une difficulté de recrutement sur le poste de business developer. Cette montée en compétence m’a permis de me former dans le domaine des études de marché. Mais aussi, de mettre un lien entre le développement commercial et l’écosystème de l’innovation pour faire face au changement dans mon secteur d’activité.
Créer le réflexe « mobilité interne »
Pour créer ce réflexe de l’interne, 2 étapes clés :
1/ Définir une politique claire et transparente
Établir « sa » politique permet de mettre en place un cadre structuré et transparent, adapté à son contexte. Et comme ce qui se conçoit bien s’explique bien, voici 7 thèmes sur lesquels réfléchir :
Les objectifs et les résultats attendus
En quoi la mobilité interne peut-elle être utile ? Quels sont ses principaux objectifs ?
Exemples : fidéliser, stimuler l’engagement, développer les compétences, contrer la pénurie de candidats, diminuer les coûts de recrutement…
Quels sont les résultats attendus ? Exemples : diminution du turn-over, amélioration de l’engagement, développement de la polyvalence, des compétences, de l’agilité… Définir les résultats que vous attendez va vous permettre de mesurer l’efficacité de votre politique et de l’ajuster si besoin.
Les principes directeurs ou valeurs
Vos valeurs servent de boussole pour guider les actes et les décisions. Elles peuvent aussi permettre de bâtir une politique qui suscite confiance et crédibilité. Exemples : l’équité, la transparence, le respect des aspirations individuelles…
Les règles de la mobilité
Définissez les postes éligibles, les restrictions éventuelles, le niveau de performance sur le poste actuel, les conditions de départ et d’arrivée (préavis, période probatoire…), etc.
Le processus de candidature
Il doit être équitable pour tous les collaborateurs.
Privilégiez ainsi la simplicité et définissez un cadre clair : à qui doit être envoyée la candidature ? Un CV est-il suffisant ? Combien d’entretiens ? Et avec qui ?
Les critères d’évaluation des candidatures
Ces critères sont spécifiques et doivent être objectifs et alignés sur les besoins stratégiques de l’entreprise. Les retours des évaluations annuelles ou les people review (revue des talents) sont des outils utiles.
Les dispositifs d’accompagnement et de développement des compétences
Au-delà de la formation, pensez : coaching, MOOCs, mentorat, AFEST, bilan professionnel ou encore programme de transition professionnelle…
Le rôle des parties prenantes
La réussite de votre politique repose en premier lieu sur ses acteurs (direction, managers, RH et salariés) et leur capacité à jouer le jeu de l’interne, en assumant leurs rôles. Définir ces rôles avec eux, c’est favoriser leur implication et leur soutien. Car c’est ensemble que ces acteurs contribuent à maximiser la mobilité interne.
Cette étape de définition de votre politique est cruciale et nécessite donc une réflexion approfondie.
Une fois posées, les choses seront plus claires et plus faciles à expliquer avec simplicité et structure.
Puis, vous pourrez passer à l’étape suivante : la sensibilisation de vos acteurs internes.
[Formation] Construire et piloter une stratégie de mobilité interne
Bâtissez votre stratégie étape par étape au fil des exercices pratiques : diagnostic de la situation dans votre entreprise, élaboration d’un processus de mobilité interne, construction des points clés d’une charte de mobilité interne, checklist des bonnes pratiques de gestion des entretiens professionnels, élaboration d’un support d’entretien de mobilité, points clés d’un plan de communication interne pour favoriser l’adhésion des salariés et des managers.
2/ Sensibiliser les acteurs internes
Sensibiliser signifie faire de la pédagogie pour expliquer votre démarche, ses enjeux, son impact positif pour chacun, les process mais aussi les bons et mauvais réflexes et les comportements à adopter. Cette étape essentielle assure l’engagement, la compréhension et la collaboration sur le long terme.
Par exemple :
- mettre en place des ateliers interservices avec les managers et/ou les collaborateurs pour évoquer les enjeux et avantages de la mobilité interne
- faire une piqûre de rappel auprès des managers et des salariés sur les objectifs de l’entretien professionnel pour valoriser la mobilité et évoquer les évolutions à venir
- animer une people review ou revue des talents (annuelle ou semestrielle) avec les managers, les RH et la direction pour en faire un outil stratégique
- communiquer régulièrement sur les postes ouverts et les mobilités réussies (témoignages des collaborateurs concernés)
Bien connaître ses collaborateurs
Les entreprises ne connaissent pas tous les souhaits et appétences de leurs collaborateurs. C’est pourquoi il est indispensable de rester à leur écoute pour capter les informations pertinentes.
Concrètement, comment faire ?
Optimisez les entretiens professionnels !
L’entretien professionnel est en effet un moment d’échange clé entre le collaborateur et son employeur, en la personne du manager de proximité, du N+2, du responsable RH ou du chef d’entreprise lui-même. D’abord, rappelez l’objectif de cet entretien pour remobiliser. Ensuite, intégrez une partie « mobilité interne » dans le guide d’entretien pour encourager des échanges sans tabou.
Avoir les bons outils et le bon niveau de communication
2 actions concrètes :
1/ Rédiger une charte de la mobilité interne
Elle concrétise votre volonté de promouvoir la mobilité interne et d’accompagner les collaborateurs dans leur projet. Formelle, elle garantit la transparence du processus et l’équité des prises de décision. En bref, la charte formalise votre politique.
Mais, même bien rédigée, une charte méconnue ou mal comprise n’aura aucun impact.
2/ Communiquer et encore communiquer
Quelques pistes de travail :
- Maintenir une communication régulière
Par exemple : newsletter mensuelle pour présenter les nouveautés et rappeler les dispositifs d’information existants.
- Mettre en place une routine de présentation des différents métiers de l’entreprise
Par exemple : journées « portes ouvertes » internes, ateliers « portraits de métiers », « tour des services » virtuel…
- Utiliser des canaux variés
Par exemple : intranet, newsletters internes, groupes sur les outils collaboratifs (Teams, Slack…), événements internes, webinaires…
Et pour vous aider dans cette tâche, découvrez aussi le programme de la formation Réussir sa communication interne. Apprenez à maîtriser des méthodologies et des outils qui varient selon l’environnement, la culture et les moyens de votre entreprise.
En conclusion, nul besoin d’être une multinationale pour mettre en place un processus de mobilité interne efficace. Néanmoins, il s’agit d’un processus global qui nécessite l’investissement de tous et la conviction profonde qu’il s’agit d’une démarche utile pour toutes les parties prenantes. Les services RH sont le moteur qui fait avancer l’entreprise sur le chemin de la mobilité interne. Alors, n’hésitez pas à promouvoir toutes les pratiques qui encouragent les collaborateurs à évoluer au sein de l’entreprise.