L’entreprise est un microcosme fait de postures et de communication, exigeant en matière de relationnel. Dirigeant, manager, collaborateur… nous avons tous besoin de maîtriser notre prise de parole afin d’asseoir notre légitimité et gagner la confiance de nos collaborateurs autant que leur adhésion.
Savoir prendre la parole et affirmer ses idées tout en restant ouvert, c’est tout un art. Exposé, présentation, entretien, vente… toutes les situations d’échange verbal demandent une maîtrise de cette compétence. Complexe et souvent subtile, la prise de parole est l’atout ultime de relations professionnelles apaisées et constructives.
Mais, rassurez-vous : ce n’est pas inné, ça s’apprend et ça se travaille !
Entre naturel, stratégie et improvisation, elle requiert un savoir-faire autant qu’un savoir être qui sont nécessaires pour vous assurer une certaine légitimité, voire, autorité, auprès de vos collaborateurs. Grégoire Tournon, expert en communication, vous dévoile les points de vigilance essentiels pour une prise de parole assertive réussie.
La prise de parole : une question de conviction
Un bon orateur est un orateur convaincu de ce qu’il dit ou annonce. Le premier principe à appliquer pour réussir votre prise de parole est donc d’être ferme sur vos convictions tout en étant souple sur la forme. En effet, il ne saurait être question d’imposer une opinion, mais bien d’être dans le partage d’idée. Il faut être convaincu soi-même pour être convaincant. Si vous ne croyez pas en votre message, ça risque de se voir !
Être assertif
Une prise de parole n’est jamais unilatérale. Et ce, même dans le cadre d’un discours, contrairement à ce que l’on pourrait croire. D’une part, parce que toute prise de parole engage la prise en compte de l’auditoire. D’autre part, parce que cet auditoire possède un droit de réponse. Dès lors, l’objectif est d’exprimer votre point de vue tout en respectant les autres. Vous devez aussi prendre l’auditoire en considération : c’est lui qui doit être « transformé » après votre intervention.
Et c’est bien là tout le principe de l’assertivité : être clair dans son message, ferme dans ses positions tout en n’oubliant pas que l’auditoire a sa place. Par sa posture, sa gestuelle, … l’orateur montre qu’il est ouvert et à l’écoute, prêt à comprendre le point de vue des autres, même dans le cas d’une parole contestataire. En effet, l’objectif n’est pas d’imposer un point de vue, mais bien in fine de trouver une solution commune et de rassurer.
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Quelques principes clés
Ainsi, pour une parole assertive, vous devez avoir à l’esprit quelques pratiques simples :
- Distribuez votre regard vers l’ensemble de l’auditoire ou des interlocuteurs
- Faites attention au paraverbal et au non verbal (gestes, voix, position…)
- Pratiquez l’écoute active
- Dissociez les faits des opinions
Au préalable, n’hésitez pas à répéter et à vous filmer.
En règle générale, une prise de parole assertive se passe bien si vous faites preuve d’empathie pour votre auditoire et si vous ne faites pas l’impasse sur une éventuelle intervention d’une personne de l’auditoire. Ce que vous devez avant tout éviter, c’est de perdre le fil de votre message. Vous devez donc répondre brièvement tout de suite ou prendre note de la remarque et y revenir au moment opportun. Pour résumer : vous écoutez, vous comprenez, vous prenez note, mais vous poursuivez.
Mais le mieux reste encore d’indiquer les règles au début de votre intervention : « Si vous avez des questions, j’y répondrai à la fin ».
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Structurer sa prise de parole
Vous avez maintenant les clés pour adopter une posture d’orateur légitime. Pour préserver cette légitimité, ne vous laissez pas déstabiliser.
Plus vous aurez travaillé votre prise de parole, moins les interventions, objections et autres aléas vous perturberont. Il est donc indispensable de structurer votre message autant que votre temps de parole afin de distribuer les rôles (qui intervient et à quel moment) et d’obtenir l’adhésion de votre auditoire.
Les étapes :
- Une accroche pour susciter l’intérêt de l’auditoire
- Un rappel de ce qui amène la prise de parole
- Un sommaire des différentes parties de votre intervention
- Quelques exemples d’objections pour devancer et tempérer celles des moins convaincus
- Des arguments qui appuient votre message
- Des exemples qui touchent votre public
- Une reformulation pour clarifier
- Une conclusion pour marquer les esprits
La place de l’auditoire
La parole de l’auditoire est nécessaire pour faire avancer les idées ou pour le faire adhérer au message. Néanmoins, vous devez rester leader de votre prise de parole : c’est à vous d’indiquer les temps d’échanges. Soit l’auditoire peut intervenir au fil de l’eau (ceci exige que vous soyez très bien préparé), soit à la fin. La seconde solution a plusieurs avantages :
- Pas de déstabilisation pendant votre prise de parole
- Vous restez maître du jeu tout le long de l’exercice
- Vous avez la possibilité d’intégrer certaines réponses à des objections fréquentes dès votre prise de parole
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La prise de parole : comprendre l’environnement pour maîtriser le jeu
Une prise de parole qui fonctionne, c’est une prise de parole qui laisse de la place aux interactions. C’est en cela que l’on parle d’improvisation. Et pour une improvisation maîtrisée, vous devez travailler deux éléments sur lesquels vous n’aurez pas de contrôle : les interventions spontanées et l’environnement.
Prendre votre auditoire en considération ne se limite pas à le regarder ou à lui parler. L’auditoire, c’est tout l’environnement dans lequel se joue la prise de parole et ce qui le constitue.
- Qu’est-ce qui l’intéresse ?
- Pourquoi les participants sont-ils présents, que veulent-ils apprendre ?
- Dans quel cadre a lieu l’événement ?
- Où la prise de parole se fait-elle ?
Fort de ces éléments, vous pouvez alors moduler votre message et éviter le monologue. Les histoires et apartés que vous intégrez en fonction du public sont comme un jeu qui rend votre prise de parole plus spontanée. Cela donne plus d’authenticité à votre discours et donc plus de légitimité.
Les interventions : de l’improvisation maîtrisée
Vous avez distribué les rôles et les temps de parole : vous êtes le maître du jeu. Néanmoins, vous n’êtes pas devin et ne maîtrisez pas tout d’une intervention. L’important est alors d’interagir tout en gardant le fil de votre message.
Deux principes à retenir :
1/ Ne jamais nier autrui
En effet, prenez en compte l’intervenant et répondez-lui. Par exemple : « Je comprends ce que tu dis, mais je ne suis pas d’accord. Est-ce qu’on peut en parler plus tard ? » ou simplement « Nous allons y revenir un peu plus tard ». En d’autres termes, ne fermez jamais la porte à la discussion, et surtout pas en cas de contradiction.
2/ Ne pas vivre les objections comme des attaques personnelles
Par ailleurs, vous devez prendre conscience des émotions que l’intervention génère sans surréagir.
Avec quelques réflexes simples, il est toujours possible de garder le contrôle sur votre prise de parole, malgré les objections (anticipées ou non).
Exemples :
- Prendre une inspiration ventrale et prendre son temps avant de répondre
- Laisser l’interlocuteur aller au bout de son objection sans lui couper la parole
- Le regarder
- Lui répondre avec de la répartie (humour, contre-attaque, ironie, dérision…)
- Répondre « je vais me renseigner » plutôt que « je ne sais pas »
Répondre aux objections
Préparer votre prise de parole, c’est aussi préparer des contre-arguments aux objections auxquelles vous vous attendez. Autrement dit, les points de vue les plus fréquemment rencontrés et autres questions qui fâchent. C’est un cas particulier d’intervention car, s’il arrive qu’elle soit de toute bonne foi, l’objection peut également être une pure tentative de déstabilisation. Et comme il ne faut jamais se laisser déstabiliser ni faire l’impasse sur une objection, il faut donc la déconstruire.
Déconstruire une objection en trois étapes :
1/ Demandez des précisions
C’est utile pour démasquer une imposture ou de la malveillance, voire pour tester la mauvaise foi de l’objecteur : « Que voulez-vous dire ? », « En quoi est-ce un problème ? »…
2/ Reformulez pour vous assurer que vous avez bien compris
« Si j’ai bien compris… », « Pour résumer… ».
3/ Recherchez une confirmation
« Sommes-nous bien d’accord ? »
Vous devez impérativement enrayer ce processus d’objection ou vous risquez de perdre le fil. Cependant, l’objection, comme la simple question, doivent être soulignées. Alors, soit vous répondez tout de suite si vous avez la réponse, soit vous y mettez fin avec diplomatie (« c’est noté, mais je ne suis pas d’accord ») et passez à autre chose. De cette manière, le débat n’a pas le temps ou la place de naître.
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En d’autres termes, maîtriser votre parole, c’est savoir vous adapter à votre environnement. Pour gagner en légitimité ou assurer celle-ci, jonglez avec les mécanismes de l’improvisation, de la répartie ainsi qu’avec la récolte d’informations sur l’environnement de votre prise de parole. La légitimité est la première étape vers l’adhésion des autres à vos idées !