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Appreciative inquiry : le changement par l’analyse du positif

Publié le 15 juin 2021
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S’il est une compétence qui se sera révélée indispensable ces derniers mois, c’est bien la capacité d’adaptation. Plus ou moins brutalement, les entreprises ont dû développer de nouveaux modes de travail, apprendre à évoluer dans un environnement lui-même évolutif. Il existe une méthode qui facilite l’adaptation au changement : l’appreciative inquiry (démarche appréciative). Julie Rommelaere, consultante en ressources humaines et coach en santé globale nous explique comment cela fonctionne.

Appreciative inquiry - ORSYS

Le changement, un concept intemporel

Aujourd’hui plus que jamais, le monde teste nos capacités d’adaptation et de résilience. Les défis sont multiples, complexes et s’étendent bien au-delà de notre sphère personnelle. Environnement, climat, santé, économie durable, travail équitable, égalité de genres et de chances, technologie et consommation responsable sont autant de sujets qui nous poussent à revoir notre mode de pensée et d’action.  Comment naviguer au mieux dans ce contexte tout en préservant l’équilibre essentiel à la vie ?

Darwin disait que « les espèces qui survivent ne sont pas les espèces les plus fortes, ni les plus intelligentes, mais celles qui s’adaptent le mieux aux changements ». Et puisque rien n’est permanent, sauf le changement, autant se donner les moyens d’y faire face avec confiance.

Réalité des entreprises et nouveau paradigme

L’entreprise est un microcosme, vivier d’expérimentation du changement. Mais comment passer de l’état actuel à la situation souhaitée, à ce nouvel équilibre ? Et comment gérer cette phase de transition, naturellement source de résistances telles que l’inertie, l’argumentation, la révolte ou le sabotage ?

En tant que composante des organisations, le changement a fait l’objet d’un nombre incalculable de publications. Nous avons le choix des méthodes, des outils et des processus. Et pourtant, le sujet reste brûlant. Pourquoi ? Peut-être tout simplement parce que « savoir » n’est pas encore « pouvoir »…

L’A.I. répond à ce dilemme. Ne vous y méprenez pas, il ne s’agit bien de « appreciative inquiry ». Nous parlons en français de démarche, investigation ou encore d’exploration appréciative.

Et si nous n’apprenions pas uniquement de nos erreurs, mais avant tout de nos réussites ? Voilà le contrepied pris par l’appreciative inquiry face à la méthode traditionnelle. Méthode bien connue des entreprises de « résolution de problèmes ». Plutôt que de se concentrer sur les échecs en cherchant à savoir ce qui ne fonctionne pas, cette méthode de conduite du changement se base volontairement sur les succès et réussites qui composent nos expériences. Il s’agit de s’appliquer méthodiquement à retrouver les énergies positives, les ressources et les forces de vie dont toute organisation dispose en son sein.

L’appreciative inquiry : une démarche collective

Basée sur les principes de la psychologie positive scientifique, l’appreciative inquiry voit le jour à la fin des années 1980. Elle naît aux États-Unis grâce aux travaux de recherche et d’expérimentation de David Cooperrider. Ses applications sont désormais nombreuses et les exemples ne manquent pas : construction d’une vision partagée, définition d’un projet collectif, fusion, restructuration, cohésion d’équipe, amélioration de la qualité du service offert, engagement des salariés, ou encore alignement du comité de direction.

La force et la particularité de cette technique de coaching est avant tout d’être participative et collaborative. Même si celle-ci peut s’appliquer à l’individu, il s’agit en effet d’une méthode de conduite du changement à grande échelle. Elle permet de rallier les équipes vers l’élaboration d’un projet commun en s’appuyant sur le vécu positif de tous les membres de l’organisation. Le défi est de taille mais passionnant et surtout, fédérateur !

Plutôt que de mener les changements sous la pression, dans l’inconfort ou la peur, la démarche appréciative fait la part belle aux compétences et à la confiance, sans oublier le plaisir. Pour cela, il suffit de regarder où, pourquoi et comment nous avons réussi, afin de reproduire les comportements moteurs. Ce sont en effet les capacités individuelles et l’envie de faire qui font la force d’un groupe humain.

Le modèle des 5 D

Le principe est simple : questionner avant d’avancer une solution. La démarche appréciative repose donc avant tout sur l’art de poser des questions exclusivement positives. À leur tour, elles induisent des réponses positives ainsi qu’une connexion automatique à des affects agréables. Or, il n’est plus à prouver que les émotions positives libèrent la créativité et la capacité à résoudre des problèmes. CQFD !

Partant de là, la démarche veille donc à créer les conditions propices à l’échange et au questionnement mutuel. Tous les membres de l’organisation découvrent eux-mêmes leurs richesses, compétences et qualités individuelles à partir d’histoires vécues. Afin de permettre à la démarche de déployer son plein potentiel, la participation de tous est requise au travers d’interviews en duo, d’échanges en groupe ou de communications publiques.

Le dialogue interne positif ainsi créé sert de socle au développement de l’organisation selon un processus hautement participatif.

La méthode se veut rigoureuse et se construit autour de 5 étapes clairement définies pour amener le collectif du plus abstrait vers le plus concret :

La Définition

Puisque les organisations vont dans le sens des questions qu’on leur pose, il s’agit ici de définir scrupuleusement le thème général et les sujets plus particuliers de l’intervention, dont le nombre se limitera à 5 maximum. Le projet, cohérent avec les ambitions de l’entreprise, sera ainsi formulé de la façon la plus stimulante possible afin de mettre en mouvement le système dans la bonne direction.

Ce travail préparatoire essentiel s’effectue en chambre par les dirigeants et/ou responsables du projet. Ils sont accompagnés par une équipe de pilotage représentative. À titre d’exemple, une organisation définirait son projet comme suit : « Nous voulons embarquer chacun et chacune dans la construction d’un projet d’entreprise visant à offrir à tous nos clients, actuels et futurs, une expérience inégalable sur le marché. »

La Découverte, ou Discovery 

Cette phase centrale permet de recueillir toutes les informations qui serviront à découvrir le « socle positif » de l’organisation. En d’autres termes, ce qui lui donne vie et autour duquel le projet sera construit. C’est au travers d’échanges structurés sur leurs expériences professionnelles propres que les participants découvrent eux-mêmes leurs sources d’énergie, de motivation, leurs richesses et compétences uniques.

Les échanges ainsi menés en duo ou en petits groupes s’articulent autour d’un guide d’entretien préalablement construit par l’équipe de pilotage. Les quatre questions appréciatives incontournables posées à tour de rôle sur chaque thème de la Définition permettent à chacun de s’exprimer en toute confiance :

  • Décrire une expérience ou situation professionnelle dans laquelle ils se sont sentis complètement engagés, plein de ressources ou de vie ;
  • Quelles sont leurs plus belles réussites ? Qu’apportent-ils de spécifique dans leur activité ? ;
  • Qu’est-ce qui leur procure le maximum de plaisir dans leur activité (organisation) ? ;
  • Quels sont les trois souhaits qu’ils formuleraient pour renforcer la bonne santé de leur activité (organisation) ?

Le Devenir, ou Dream 

Cette troisième phase consiste à projeter le collectif dans l’avenir le plus désirable. On imagine alors « ce qui pourrait être » en se basant sur « ce qui est déjà » et que l’on valorise.

À ce stade, les échanges sont menés en sous-groupes de 6 à 10 personnes. Ils portent essentiellement sur la quatrième question de la phase Découverte. Les thèmes des différents rêves et souhaits individuels sont regroupés et ensuite présentés de façon créative, voir ludique au travers de dessins, jeux de rôles ou slogans. Au final, la proposition retenue est enrichie avant d’être validée par l’ensemble.

La Décision, ou Design 

Vient ensuite le temps de décider des grandes actions à entreprendre pour se donner les moyens de réaliser ce rêve. Cette avant-dernière phase fait place à la construction et à l’orientation que l’on souhaite donner à l’utilisation des ressources.

Ici encore, le travail s’effectue d’abord en sous-groupes, partant de la vision commune (du Devenir) afin d’orienter subtilement l’utilisation des ressources et des talents disponibles en interne. L’animateur de session veille ensuite à orchestrer un échange général dont l’objectif est de présenter, reformuler et regrouper les propositions de décision dans les différents domaines pertinents (stratégie, structure, savoir-faire, communication, processus…).

Le Déploiement, ou Destiny

Enfin, la mise en place d’un plan d’action concret permet de transformer le « rêve » en réalité. Chacun s’approprie par la même occasion une nouvelle méthode d’analyse de son travail et de conduite du…changement !

Des groupes auto-organisés composés de volontaires enthousiastes, éventuellement soutenus par l’équipe de pilotage, veilleront à maintenir la dynamique positive au long cours. Sans se limiter à communiquer sur le travail déjà réalisé et les premiers résultats observables, ceux-ci décident des plans d’actions appropriés, des initiatives à mener et comportements à adopter, tout en prévoyant les moyens de mesure du changement.

En guise de conclusion

Si vous ne l’avez pas encore essayée, la démarche appréciative vous séduira sans aucun doute par son approche résolument positive. Elle conjugue habilement le passé, le présent et le futur pour assurer la continuité de l’organisation, faciliter sa transition et embrasser la nouveauté.

L’adopter, c’est satisfaire les trois besoins essentiels à la motivation que sont l’autonomie, la compétence et l’appartenance.

Notre expert

Julie ROMMELAERE

RH, coaching en santé globale

Elle voit le travail en entreprise comme un sport de haut niveau exigeant bien des qualités [...]

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