Face à la généralisation des services administratifs en ligne, l’accueil dans le service public gère souvent les situations les plus difficiles. Disposer de solides compétences en communication interpersonnelle est indispensable pour assurer sereinement cette mission essentielle du service public.
L’accueil dans le service public est un acte de relation humaine : il humanise l’administration. Plus encore que dans le secteur privé, il réunit des personnes issues de mondes différents. Et surtout, l’accueil est la porte d’entrée pour des personnes venues solliciter un service, faire valoir un droit ou encore répondre à une convocation. Il nécessite donc une posture dynamique et bienveillante vis-à-vis du public accueilli. C’est pourquoi les professionnels chargés de l’accueil dans le service public doivent acquérir, développer et enrichir leurs aptitudes de communication interpersonnelle. Le point avec Marylène Exposito, spécialiste en communication managériale.
À l’accueil : adopter les bonnes pratiques de communication
Pour être efficace, le premier contact doit se centrer sur l’interlocuteur et non sur l’écran de l’ordinateur. La bonne pratique ? Toujours rester relié à l’autre par le regard ou par la voix. Ils agissent en effet comme des aimants qui fixent l’attention de l’interlocuteur.
« Le regard et la voix sont deux outils de communication incontournables dans l’accueil. »
Développer l’écoute et l’empathie
Au cours des formations, j’accompagne les professionnels pour qu’ils développent des aptitudes en communication corporelle et verbale. Qui dit communication dit attitude comportementale ouverte à l’autre. Nous pratiquons donc des exercices d’écoute et d’empathie afin de mieux comprendre la demande et les besoins sous-jacents.
Par exemple, qu’y a-t-il derrière la question « Je dois attendre combien de temps ? » Cette personne a peut-être des horaires de travail à respecter ou des problèmes de santé… En effet, une même demande peut cacher des besoins très différents : besoins de s’organiser, de se nourrir, d’être rassuré, d’être reconnu…
C’est pourquoi il est si important que l’accueil aborde l’autre comme un individu avec ses spécificités. Et non comme une catégorie uniforme : les locataires, les allocataires, les patients, les usagers, les assurés…
Personnaliser l’accueil pour prévenir les tensions et les conflits
La personnalisation de l’accueil prévient les tensions et les conflits. Elle est aussi très liée à la qualité d’écoute.
« Être écouté, c’est être moins frustré et parfois un peu calmé ».
Dès le premier contact, l’individu doit se sentir unique, même si pour le professionnel de l’accueil il est l’énième personne. Imaginez un médecin qui vous soignerait moins bien sous prétexte que vous êtes son énième patient !
Dans l’accueil, la manière de communiquer agit tel un boomerang : elle a d’abord un impact sur l’autre puis sur soi.
Du contrôle des émotions à la bonne distance émotionnelle
« Comment maîtriser mes émotions face à une ou plusieurs personnes qui ne contrôlent pas les leurs ? Comment faire face aux pleurs, à la détresse ou au désespoir ? Comment gérer la colère, les critiques ou les injures ? Voire des menaces ou menaces de suicide ? » Autant de questions fréquemment posées lors des formations sur l’accueil organisées pour différents secteurs du service public.
D’une manière générale, l’accueil exige une capacité de contrôler ses réactions, sa fatigue, son stress et ses émotions. Pour cela, les professionnels ont besoin de prendre du recul.
Développer des émotions positives
En formation, j’accompagne les participants à développer leur self-control en s’appuyant sur des émotions positives. Cela passe notamment par le soutien de l’équipe, la respiration, la visualisation d’une image positive ou d’un souvenir agréable, des croyances ressources…
« À l’image du cavalier sur son cheval, l’accueil exige de tenir les rênes de ses émotions, sans se laisser emporter par le galop des émotions de l’autre. À l’image du capitaine sur son bateau, le professionnel de l’accueil tient la barre et garde le cap. »
Garder « la juste distance »
Les services publics accueillent souvent des personnes vulnérables. Les professionnels de l’accueil se situent ainsi à la croisée des chemins de l’administration, de la santé et du social. Ils peuvent être confrontés à des situations de détresse suscitant en eux un sentiment de culpabilité, d’impuissance ou de « sur-empathie » associé à un besoin d’aider l’autre au-delà de sa mission. Dans ces situations, ils sont au cœur de la relation d’aide sans pour autant être des professionnels de santé ni des professionnels du secteur social et médico-social. C’est pourquoi, en formation, je les guide pour qu’ils apprennent à prendre de la distance émotionnelle et à garder « la juste distance ». Mieux vivre ces situations leur permet de mieux accompagner l’usager dans les limites et contraintes de leur mission de service public.
L’accueil, un service public à part entière ?
L’accueil est à la fois la première main tendue et un service public à part entière. Ce n’est pas un simple réceptacle.
Cette mission requiert un réel savoir-faire en communication. On peut développer ce savoir-faire à l’aide de diverses techniques comme l’écoute active, la Communication NonViolente ou encore l’analyse transactionnelle. L’objectif est d’acquérir au cours de deux ou trois jours de formation, des compétences utiles et mobilisables dès le retour sur le terrain. Puis, comme pour le sport, l’entrainement doit se poursuivre dans le quotidien professionnel.
« La communication est comme une langue vivante. Il faut pratiquer ! »
À l’heure où les services administratifs en ligne battent leur plein, on apprécie d’autant plus la dimension humaine de l’accueil qu’elle se fait rare. L’accueil physique et téléphonique traite et traitera, de plus en plus, les situations les plus difficiles. C’est pourquoi il aura toujours plus besoin des savoir-faire spécifiques à la communication.
On ne dira plus, comme je l’ai tant entendu dans les années 2000 : « Tu n’as pas de qualification, tu peux aller à l’accueil ». Au contraire, on dira : « Tu as les compétences pour exercer ce métier ». Pour conclure, je dirais même : « Si tu aimes la relation humaine, tu t’épanouiras dans ce beau métier, complexe, utile et très gratifiant par sa forte dimension humaine et son rôle clé de service public ».