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Digital learning : quelles perspectives pour les pratiques formatives ?

Publié le 21 février 2022
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La pandémie de COVID-19 et les confinements successifs ont largement favorisé le déploiement du digital learning. Mais passée la crise, beaucoup s’interrogent : va-t-on mettre de côté les outils numériques pour revenir progressivement au « tout présentiel », comme avant ? Autrement dit, le digital learning va-t-il s’installer définitivement au premier plan dans le paysage de la formation ou va-t-il se cantonner à une solution de repli de type plan B ? Pour Mathilde Istin, directrice déléguée de l’ISTF et spécialiste de la digitalisation des formations, le digital learning va s’inscrire dans la durée à condition de respecter quelques fondamentaux et bonnes pratiques.   

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Avant la crise sanitaire, beaucoup évoquaient le digital learning sans savoir exactement en quoi cela consiste. Et ce, qu’on soit participant, formateur ou responsable de formation. Avec les confinements successifs et les contraintes de distanciation, le digital learning s’est beaucoup développé. Nombreux sont ceux qui ont pu se faire une idée plus précise en l’expérimentant directement. Pourtant, même aujourd’hui, il reste légitime de se questionner : qu’est-ce que le digital learning ? S’agit-il de classes virtuelles, d’e-learning, de formations à distance ou encore du fait d’utiliser des outils numériques lors d’une session de formation ?

Digital learning, de quoi parle-t-on ?

Afin de parler le même langage, faisons un peu le tri. Commençons par ce que n’est pas le digital learning.

Premièrement, le digital learning n’est pas synonyme de classe virtuelle. Celle-ci n’est qu’une des composantes des parcours de formation à distance. La classe virtuelle a pour caractéristique d’être synchrone, c’est-à-dire que les apprenants et les formateurs se retrouvent au même moment ensemble pour réaliser un acte de formation. À la différence du présentiel, qui est également du synchrone, en classe virtuelle les participants ne sont pas regroupés dans un même lieu. Ils sont connectés à distance via un outil informatique comme Teams, Zoom, Classilio, Big Blue Button, etc.

Deuxièmement, le digital learning ne doit pas être confondu avec des contenus e-learning. Ceux-ci ne sont également qu’une des composantes des formations en ligne. Un contenu e-learning présente deux caractéristiques principales. Il est asynchrone : l’apprenant est seul, sans le formateur. Il est autoformatif : les corrections des erreurs de l’apprenant sont préprogrammées. Pour créer des modules e-learning, il existe des outils auteurs. C’est-à-dire des logiciels dédiés avec des fonctionnalités poussées, comme Articulate Storyline ou Adobe Captivate. D’autres solutions, issues du web, sont plus faciles à prendre en main, comme Genially. On peut aussi créer des ressources asynchrones facilement et rapidement avec PowerPoint.

Mais alors, comment définir le digital learning ? On peut principalement retenir deux définitions.

Une première définition dite « historique »

Un apprentissage peut être qualifié de digital learning dès lors qu’il inclut l’usage du numérique. Dans ce cas, une formation en salle qui utilise des outils d’interactivité de type Klaxoon, Wooclap ou encore Beekast est considérée comme digitalisée. Cette définition est d’une certaine manière la plus pertinente bien qu’elle ne soit pas la plus courante.

Une deuxième définition, plus répandue

En effet, le marché caractérise plutôt aujourd’hui le digital learning comme un parcours de formation multimodal. C’est-à-dire un parcours de formation qui allie plusieurs modalités : des modules e-learning, des classes virtuelles, du tutorat et parfois du présentiel. Une autre terminologie est employée quand une partie de la formation se réalise en salle : le blended learning. Cela désigne un parcours alliant distanciel et présentiel.

Les paris gagnants du digital learning

À l’origine, le marché de la formation était porté par l’utopie que de simples modules asynchrones autoformatifs, c’est-à-dire les modules d’e-learning, pourraient remplacer à eux seuls des formations pleines et entières. La formation à distance avait alors mauvaise réputation, car menaçait de se substituer au présentiel et donc de supprimer le métier de formateur.

Puis, le lexique de la formation à distance s’est enrichi de nouveaux termes : « rapid learning », « learning game »… Aujourd’hui, grâce à une diversité de modalités, on porte un autre regard sur le digital learning. Les formations sont devenues de véritables combinaisons bien pensées de différentes modalités pédagogiques. L’idée étant de tirer parti des avantages de chacune. Le distanciel ne vient donc plus remplacer coûte que coûte le présentiel (du moins, quand les conditions sanitaires ne l’imposent pas). Au contraire, le distanciel complète le présentiel et permet de même de l’optimiser, au travers notamment du blended learning. De même, le synchrone vient renforcer les apports transmis en asynchrone.

Nombre de formateurs, managers et responsables de formation ont eu l’occasion d’expérimenter eux-mêmes, chacun dans leur rôle, ce type de parcours multimodaux à distance.

« Aujourd’hui, le digital learning a gagné ses galons. »

Ainsi, le digital learning n’est plus perçu comme un autre métier ou comme une prestation moins qualitative qui demande de lourds investissements sur le plan financier. Il a fallu le temps d’expérimenter d’abord, de pratiquer ensuite, pour finalement intégrer dans les pratiques des acteurs de la formation un digital learning très qualitatif. Mais, pour cela, le digital learning doit respecter certains fondamentaux.

Les trois fondamentaux d’un digital learning engageant

Chaque année, l’ISTF interroge 400 professionnels de la formation sur leur approche du digital learning. Dans sa 8e édition, cette enquête met en évidence les trois fondements d’une formation digitale engageante. Autrement dit, les trois principaux facteurs d’engagement des apprenants pendant leur formation.

Dans le domaine de la formation, l’engagement des apprenants est ce qui permet de les emmener du début à la fin du parcours. L’objectif est donc de susciter mais aussi de maintenir leur intérêt tout au long de la formation. L’engagement se mesure via le taux de complétude ou de complétion. C’est le rapport entre le nombre d’apprenants qui vont au bout de leur formation et le nombre d’apprenants inscrits.

1/ Une formation en lien avec les problématiques « métier » de l’apprenant

Derrière ce premier facteur d’engagement se cache la notion de time to business. La formation est là pour rendre le participant efficace dans son travail d’aujourd’hui ou dans son plan de carrière, c’est-à-dire son travail de demain. Y parvenir implique que l’entreprise puisse diagnostiquer ou recueillir les besoins. Et surtout proposer immédiatement une formation digitale en phase avec ces besoins.

« Une formation time to business »

Prenons l’exemple d’une formation de commerciaux à un nouveau produit, partout en France. En envisageant la formation présentielle uniquement, l’action requise ne pourrait se déployer qu’après avoir organisé les déplacements, recruté ou planifié l’intervention des formateurs, mais aussi la présence physique des participants. Et on ne parle ici que de la logistique. La formation arrivera donc certainement après que les commerciaux en auront eu besoin car, entre-temps, ils auront découvert la nouveauté par eux-mêmes pour être efficaces sur le terrain. Leur engagement lors de la formation sera donc faible car elle ne sera plus time to business. C’est tout le contraire avec, par exemple, une classe virtuelle : session de formation courte, synchrone, à distance, avec un outil visio comme Teams ou Zoom. L’équipe formation y gagne en réactivité pour répondre aux attentes des participants.

Pour l’entreprise, cette capacité à délivrer des formations rapidement, facilitée par la digitalisation des formations, va de pair avec l’anticipation des besoins en compétences et donc le pilotage des compétences de ses collaborateurs. Mais, pour le service formation et le management, évaluer l’atteinte d’objectifs pédagogiques après une formation s’avère difficile en pratique. Or, « ce qui ne se mesure pas ne se manage pas », selon la formule popularisée par Peter Drucker, spécialiste du management. C’est pourquoi la formation s’oriente désormais de plus en plus directement vers la validation des compétences, grâce à des microcertifications notamment, au lieu de simplement viser des objectifs pédagogiques.

En clair : piloter la formation par les compétences, c’est avant tout se mettre en capacité de les mesurer et au final de les certifier.  

2/ La délivrance d’une certification

En France, la question de la certification se limite souvent à un aspect économique puisqu’elle conditionne l’éligibilité de l’action de formation au CPF (Compte personnel de formation). Rappelons-le, le CPF permet au participant de financer en toute autonomie une partie ou l’ensemble de sa formation. Pourtant, au-delà de cet aspect économique, ce qu’attend l’apprenant c’est une vraie reconnaissance professionnelle des compétences acquises ou renforcées par la formation.

C’est donc sans surprise que l’obtention d’une certification se classe au deuxième rang des facteurs d’engagement en formation selon l’enquête ISTF. Et ce, que la certification soit nationale, donc éligible au CPF, ou non. Outre les titres enregistrés aux différents répertoires de France compétences, il existe aussi des certifications et badges privés que certains organismes de formation ou entreprises proposent à l’issue de leurs formations.

Afin de répondre à cette évolution du marché de la formation, des plateformes digitales dites de micro-credential ont fait leur apparition en France à l’image de Procertif, Credly ou BCdiploma. Elles permettent de matérialiser la validation des compétences via des certificats numériques sécurisés.

3/ La présence d’un tuteur

L’accompagnement par un tuteur constitue le troisième facteur d’engagement des apprenants pendant une formation digitalisée. Il influence aussi bien le fait de démarrer sa formation que celui de la conclure. Quand la formation se déroule tout ou en partie à distance, le défi du formateur est d’engager le maximum d’apprenants et d’en amener le plus possible au bout du dispositif. Notre enquête 2021 montre ainsi que le tutorat, soit l’accompagnement mis en place par le formateur ou un tuteur pendant la formation, a un impact considérable sur cet engagement.

Digital learning : chiffres clés de la formation
Source : Les chiffres 2021 du digital learning (ISTF)

Sans tutorat, un dispositif sur deux n’engagera pas plus de 10 % des participants. Cela signifie que pour la moitié des formations lancées, neuf apprenants sur dix n’iront pas au bout de leur parcours. Avec du tutorat, en revanche, plus de six formations sur dix emmèneront plus de 60 % des participants jusqu’à la fin de leur parcours.

La possibilité pour l’apprenant d’échanger avec le formateur tout au long du parcours multimodal est sans doute ce qui va le plus différencier la qualité des formations à distance dans les prochaines années.

Finalement, les perspectives du digital learning sont aussi grandes que sont nombreux les besoins de formation. Elles se trouvent dans tous les secteurs d’activité et dans toutes les strates hiérarchiques. À condition d’intégrer que la qualité du digital learning passe avant tout par les femmes et les hommes qui conçoivent et animent les parcours de formation. Le rôle du formateur est encore plus central à distance qu’en présentiel. Ceux qui feront ce pari seront les gagnants du digital learning.

Notre expert

Mathilde ISTIN

Digitalisation des formations

Après un parcours spécialisé en commerce et marketing, elle forge son expérience dans le numérique et le digital [...]

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