Le schéma de promotion des achats socialement et écologiquement responsables (SPASER) est une obligation pour certaines collectivités. Perçu comme une contrainte au premier abord, il peut toutefois s’avérer être une opportunité. En devenant une feuille de route avec des objectifs clairs, il permet de fédérer les acteurs en interne tout en donnant de la visibilité à l’externe. Le point avec Laurence Guittard Leroy*, consultante et formatrice spécialiste des marchés publics.
Que vous soyez élu, responsable d’achat public ou acheteur public, les nombreux exemples de SPASER existants représentent une source d’inspiration.
Leur richesse constitue en effet un référentiel de solutions pour vous aider à définir et à mettre en place une politique d’achat public durable et performante.
SPASER : qui est concerné ?
La loi du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire les avait baptisés schémas de promotion des achats publics socialement responsables. Ils concernaient alors les collectivités dont le montant d’achat annuel est supérieur à 100 millions d’euros. Dans la pratique, on les appelle SPAR.
C’est la loi « transition énergétique pour la croissance verte » du 17 août 2015 qui a apporté une dimension « écologie » au dispositif. On parle désormais de schémas de promotion des achats publics socialement et écologiquement responsables. D’où l’appellation SPASER. Et surtout, la loi « climat et résilience » du 22 août 2021 les a renforcés en termes de contenu et de gouvernance.
Depuis, l’obligation d’élaborer un SPASER a été étendue aux collectivités dont le montant d’achat annuel dépasse les 50 millions d’euros. C’est en effet ce que prévoit un décret du 2 mai 2002, pris en application de la loi « climat et résilience ». Ces collectivités doivent donc réaliser leur SPASER d’ici au 1er janvier 2023.
À noter : des structures ou collectivités nonconcernées par l’obligation peuvent également réaliser un SPASER. C’est le cas de SYTRAL Mobilités, l’autorité organisatrice des mobilités des territoires lyonnais, par exemple !
Les SPASER s’intègrent dans le Plan national pour des achats durables (PNAD) 2022-2025.
Que doit contenir un SPASER ?
Tout d’abord, un SPASER doit contenir des objectifs de passation à caractère social. Il doit aussi comporter des éléments à caractère écologique et promouvoir l’économie circulaire.
Bien entendu, il doit aussi respecter le code de la commande publique et les objectifs du PNAD à l’horizon 2025. À savoir 100 % des marchés avec une clause environnementale et 30 % avec une considération sociale.
Mais, ce n’est pas tout : un SPASER doit enfin comporter des éléments de gouvernance et de suivi. C’est-à-dire, des éléments qui précisent ses modalités de mise en œuvre et de suivi annuel des objectifs.
Les méthodes pour constituer un SPASER
Les collectivités sont très libres dans la définition de leurs schémas. En termes de méthode, collaboration et volonté politique font partie des bonnes pratiques.
Un travail collaboratif
Le plus souvent, les collectivités élaborent leur SPASER en transversalité. Autrement dit, elles impliquent – au-delà du service achat – différents services de la collectivité, voire tous les services.
Dans certains cas, elles associent aussi à la démarche des acteurs de l’économie sociale et solidaire (ESS). Cela permet des temps de coconstruction préalables, notamment pour valider le réalisme de certains objectifs. L’Eurométropole de Strasbourg a suivi cette méthode en créant un groupe de travail transverse. Le travail collaboratif a permis d’enrichir le nouveau SPASER par rapport au premier schéma et se prolongera pour son suivi.
Certaines collectivités proposent même une consultation publique en ligne afin de récolter les avis des entreprises du territoire. C’est le cas de la région Bretagne qui a su mobiliser les parties prenantes de manière innovante et participative. Les organisations professionnelles, syndicats, entreprises, acheteurs, citoyens… ont pu exprimer leurs contraintes, attentes et propositions en ligne. Le SPASER de la région Bretagne apporte ainsi des réponses au plus près des problématiques soulevées.
Une volonté politique
Chaque SPASER implique de faire évoluer les pratiques d’achat. Pour y arriver, une volonté politique forte doit être présente.
Vous l’aurez compris : la méthode consiste avant tout à s’adapter ! Non seulement s’adapter au contexte local de ses achats, mais aussi s’adapter à la volonté politique de l’équipe en place.
Comment communiquer sur son SPASER ?
Communiquer sur son SPASER, une fois qu’il a été entériné, est une exigence de la loi. C’est aussi l’occasion de fédérer les acteurs internes et d’initier le sourcing d’acteurs locaux.
Pour cela, certaines collectivités mettent en place une communication en ligne via leur site Internet.
D’autres réalisent des réunions publiques en présentiel et en visio-conférence avec les acteurs locaux. C’est le cas de la ville de Lyon. Organisées avec l’appui de la CCI et Lyon Pacte PME, ces réunions lui ont assuré une large audience auprès des entrepreneurs. Et surtout, des prises de rendez-vous acheteurs/entrepreneurs !
Pièges à éviter et solutions
S’inspirer d’autres SPASER pour constituer le sien est certainement une très bonne idée. Toutefois, mieux vaut éviter le piège du copier-coller qui peut amener à un SPASER non réaliste et non applicable. Alors, comment procéder ?
Piège n° 1 : être décorrélé de la réalité
Pour être réaliste, un SPASER doit être issu d’un travail collaboratif. Il nécessite en outre de bien connaître ses achats et les leviers possibles.
Piège n° 2 : perdre du temps
La réalisation d’un SPASER peut être chronophage. L’idéal est donc de désigner un chef de projet. Il aura la charge de définir un plan d’action avec les acteurs, de suivre le planning et de recadrer, si nécessaire, les débats.
Piège n° 3 : fixer des objectifs impossibles à suivre
Pour être crédibles, les objectifs que vous mettez dans votre SPASER doivent être atteignables. Faire appel aux connaissances des acheteurs voire au sourcing afin de les contrôler en amont est impératif. Ils doivent aussi être mesurables simplement et surtout pas trop nombreux.
Piège n° 4 : être non conforme
Rester conforme au code des marchés publics n’est pas toujours évident. Et pourtant cela reste une exigence qui nécessite un contrôle systématique.
Qu’est-ce qu’un SPASER réussi ?
Pour résumer, un SPASER réussi est un schéma réaliste, adapté au contexte local et à la collectivité qui le porte. Ses objectifs sont clairs, mesurables et atteignables et, bien sûr, en cohérence avec le PNAD.
Le SPASER formalise une volonté politique et s’inscrit dans le temps. Il constitue une feuille de route qui fédère les acteurs en interne.
Sa communication à l’externe donne de la visibilité aux parties prenantes de la collectivité. Elle facilite aussi la mise en œuvre d’achats plus durables.
Les SPASER sont amenés à jouer un rôle exemplaire dans la commande publique. Ils sont source d’inspiration pour les décideurs et les acheteurs publics dans la définition de leur propre politique d’achats responsables. C’est d’ailleurs pour cela que des structures ou des collectivités non concernées par l’obligation en réalisent quand même un !